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Le marché des produits de nutrition sportive regorge de suppléments, boissons et poudres qui promettent d'améliorer les performances à l'entraînement. | Photo : Radio-Canada / Ariane Pelletier

Que mange-t-on pour améliorer ses performances sportives et atteindre ses objectifs d’entraînement? Les réseaux sociaux regorgent de conseils – et les commerces, de produits – qui promettent de faire fondre votre gras ou de vous hydrater de la manière la plus optimale qui soit. Pour distinguer le vrai du faux, et départager le marketing de la science, on a fait appel à deux spécialistes qui ont examiné quelques tendances en nutrition sportive.

Le CBD, molécule miracle?

Le mot cannabidiol (CBD), nom d’une composante active du cannabis, est sur toutes les lèvres depuis quelques années. Une petite recherche sur Google mène à une panoplie d’articles mentionnant l’intérêt d’athlètes célèbres pour la molécule, notamment depuis que celle-ci a été retirée de la liste des substances interdites par l’Agence mondiale antidopage, en 2018.

Qu’apporte le CBD aux personnes sportives? Parmi les effets potentiellement bénéfiques pour elles, on mentionne le plus souvent la réduction de l’inflammation, donc de la douleur, et l’amélioration du sommeil.

« Il y a de la littérature scientifique qui a été développée ces dernières années et qui démontre certains bénéfices [du CBD] pour ce qui est de l’inflammation, de la récupération et du sommeil, entre autres. »

— Une citation de  Dr Jérôme Ouellet, pédiatre spécialisé en médecine sportive

Malheureusement, ces études ont plusieurs lacunes : certaines ont été faites sur des animaux, et d’autres utilisaient des critères plus subjectifs. Mais surtout, ça n’a pas encore été étudié dans des cohortes d’athlètes.

Cela explique peut-être en partie pourquoi l’enthousiasme pour les boissons destinées à un public sportif qui contiennent du CBD, qu’on voyait poindre en 2019 et en 2020, n’a pas eu l’ampleur escomptée, du moins pas encore au Canada.

La caféine et la performance sportive

La caféine est largement reconnue comme une substance qui peut améliorer – légèrement – les performances sportives, particulièrement pour des sports d’endurance, comme la course à pied et le vélo, et les sports à haute intensité, comme le soccer ou le hockey.

La caféine, à raison de 3 à 6 milligrammes par kilogramme de poids, 60 minutes avant l’effort, peut avoir un impact positif sur les performances, souligne la nutritionniste Mélanie Olivier, présidente et fondatrice de Vivaï nutrition sportive(Nouvelle fenêtre). Une tasse de café contient en moyenne 135 mg de caféine, selon Santé Canada.

Deux principaux effets sont recherchés lorsque des athlètes prennent une dose de caféine : la diminution de la sensation de fatigue et la stimulation du système nerveux central, ce qui rend plus alerte et raccourcit le temps de réaction.

La caféine a aussi l’avantage – ou désavantage – de stimuler le système digestif. Ça peut être pratique si l’on veut faire ses besoins avant une longue course... mais moins si on a oublié de prendre cet effet en compte.

La caféine, dans un dosage approprié, peut être bénéfique pour les performances sportives.
La caféine, dans un dosage approprié, peut être bénéfique pour les performances sportives. | Photo : iStock

Il faut toutefois savoir que chaque personne répond différemment à la caféine. On connaît tous quelqu’un qui peut prendre un café, puis aller se coucher, alors que d’autres personnes ne peuvent absolument pas en prendre, vont avoir des palpitations cardiaques ou être surexcitées mentionne la nutritionniste.

Il est donc bien important de savoir ce qui convient à son propre corps, en s’assurant que la prise de caféine ne vient pas nuire à la qualité du sommeil.

Également, il faut se méfier des produits qui, comme plusieurs boissons énergisantes, contiennent de la caféine en très grande quantité ou des équivalents – sans parler d’une panoplie d'ingrédients de toutes sortes, comme du sucre et d’autres stimulants.

Les ingrédients superflus et essentiels dans les boissons sportives

Électrolytes, glucides, acides aminés, vitamines, minéraux, eau de coco : la liste d’ingrédients de certaines boissons sportives et mélanges pour boissons hydratantes peut donner le tournis.

Les boissons Prime, popularisées par les influenceurs Logan Paul et KSI, en sont un exemple frappant. La gamme de produits Prime Energy est d’ailleurs interdite au Canada en raison de sa très haute teneur en caféine(Nouvelle fenêtre).

Si l’on se concentre seulement sur les boissons pour s’hydrater, en excluant les boissons énergisantes dont le marketing vise les sportifs et sportives, deux éléments devraient se trouver en priorité parmi les ingrédients : des glucides et des électrolytes (surtout du sodium).

Les boissons sportives peuvent contenir toutes sortes d'ingrédients, mais seulement quelques uns sont réellement nécessaires pour bien se réhydrater.
Les boissons sportives peuvent contenir toutes sortes d'ingrédients, mais seulement quelques uns sont réellement nécessaires pour bien se réhydrater. | Photo : iStock

Pour un exercice de moins d’une heure, l’eau suffit pour s’hydrater dans la majorité des cas, sauf si l’on transpire beaucoup. Au-delà d’une heure d’exercice, il devient important de remplacer le sodium, que l’on perd par la sueur, et les glucides, que les muscles utilisent pour fournir un effort soutenu.

Pour ce qui est des autres ingrédients contenus dans ces boissons, et de leur nécessité, il y a énormément de marketing derrière tout ça, et peu de littérature scientifique pour l’appuyer, selon le Dr Jérôme Ouellet.

Les mélanges préentraînement (poudres) : qu’est-ce qu’il y a là-dedans?

On emploie souvent un vocabulaire agressif, limite guerrier, pour vendre les poudres préentraînement, qui promettent entre autres un entraînement dur, intense et ciblé avec des résultats explosifs garantis. On vante les mérites de ces produits pour optimiser les séances d’entraînement de tous les types de personnes sportives : des adeptes de la musculation aux coureuses et coureurs invétérés.

La description des effets de ces produits peut parfois nous laisser perplexes. Force et puissance, synthèse des protéines, neuropiratage et hydratation musculaire, peut-on lire dans la fiche commerciale d’une poudre préentraînement vendue dans une populaire chaîne de suppléments alimentaires.

Ces produits combinent souvent plus d’un stimulant, dont presque toujours de la caféine, souvent en grande quantité, avec différents acides aminés et protéines, et des vitamines.

Les principales préoccupations quant aux stimulants [comme la caféine], ce sont leurs effets [néfastes] sur le sommeil et les problèmes cardiaques qui peuvent surgir, selon la nutritionniste Mélanie Olivier.

Si le corps [de la personne qui en prend] est sensible à la caféine, ça peut mener à des arythmies cardiaques, ajoute le Dr Jérôme Ouellet, pédiatre spécialisé en médecine sportive.

Les poudres préentraînement contiennent souvent de la caféine en dose importante.
Les poudres préentraînement contiennent souvent de la caféine en dose importante. | Photo : iStock

Au-delà de la caféine, tous ces acides aminés, ces protéines, ces vitamines et autres suppléments sont-ils nécessaires?

« Règle générale, si l’on a une alimentation riche et variée, basée sur le Guide alimentaire canadien, tout ce surplus de protéines, de minéraux et de vitamines qu’on ingère va se retrouver aux toilettes. »

— Une citation de  Dr Jérôme Ouellet

Par ailleurs, sait-on vraiment ce que contiennent ces mélanges préentraînement? Car contrairement aux industries alimentaire et pharmaceutique, celle des suppléments sportifs est très peu réglementée.

Ainsi, il est possible que certains ingrédients présents dans un produit ne soient pas inscrits sur l’étiquette. Les produits peuvent également être préparés dans des conditions propices à la contamination, ce qui peut être particulièrement risqué pour des athlètes qui doivent se soumettre à des tests de dopage.

Des programmes de certification internationaux existent pour aider les personnes qui souhaitent consommer des suppléments à choisir des produits qui ne contiennent pas de substances interdites, notamment Informed Sport(Nouvelle fenêtre) et Certified for Sport de NSF International(Nouvelle fenêtre).

Les BCAA en vogue

On trouve les acides aminés branchés ou à chaîne ramifiée (BCAA) dans des mélanges de poudres sur les tablettes de magasins de suppléments alimentaires pour personnes sportives, mais aussi dans des boissons hydratantes, comme les très populaires – et controversés – produits Prime.

Ces acides aminés, nommément la leucine, l’isoleucine et la valine, permettraient de maximiser le gain de masse musculaire à l’entraînement, mais également de faciliter la récupération musculaire, selon les allégations commerciales souvent formulées.

« Les évidences scientifiques des effets [des acides aminés branchés] chez les athlètes ne sont pas claires. [...] On sait que les acides aminés branchés, particulièrement la leucine, vont activer le signal anabolique, c’est-à-dire ce qui va créer de la masse musculaire. »

— Une citation de  Mélanie Olivier, nutritionniste

Sur le plan théorique, dans des activités de résistance où l’on veut faire des gains en musculation, on croit que ça pourrait aider, mais la seule chose qu’on a vraiment été capable de démontrer [avec les acides aminés branchés], c’est la diminution de la douleur après l’exercice.

Selon la nutritionniste, les suppléments de BCAA peuvent avoir une utilité dans certains cas, comme pour les adeptes des ultramarathons, qui les utilisent pour se refaire un stock de protéines rapidement, sans avoir à digérer un repas, durant une longue séance d’effort à haute intensité.

Pour le commun des sportifs et sportives, la supplémentation en BCAA n’apporte toutefois pas grand-chose. Les BCAA sont d'abord dans les aliments, et si tu as une alimentation avec des protéines de haute qualité, que tu répartis bien tes protéines sur la journée, que tu manges des aliments riches en bons glucides, la supplémentation n’aura pas un effet significatif.

Une liste non-exhaustive d'aliments qui contiennent des BCAA : viande, poulet, poisson, fèves, lentilles, lait, tofu, tempeh, fromage, œufs et noix.

Le marché des produits de nutrition sportive regorge de suppléments, boissons et poudres qui promettent d'améliorer les performances à l'entraînement. | Photo : Radio-Canada / Ariane Pelletier